Il y a encore quelques semaines, il n’était pas question pour les Modérés (conservateurs) de s’entendre avec la formation à leur droite, les Démocrates de Suède (extrême droite). Ce parti n’existait tout simplement pas ! Les temps changent et avec eux les ajustements qui les justifient… Les conservateurs suédois sont désormais prêts à collaborer avec la droite extrême. Que ne ferait-on pas pour faire tomber le gouvernement de coalition au pouvoir (Sociaux-démocrates, Verts) ?

Anna Kinberg Batra, la cheffe de file de la formation conservatrice, en perte de vitesse dans les sondages, a décidé de se démarquer en annonçant la couleur : son parti ne votera pas le prochain budget et aura le soutien dans sa démarche du parti de l’extrême droite. Une décision qui ne va pas de soi au sein de l’Alliance, composée des Libéraux, des Centristes, des Chrétiens-démocrates et donc des Modérés. Libéraux et Centristes y sont opposés, les Chrétiens-démocrates (moins de 4 %) favorables. L’Alliance devrait donc théoriquement voler en éclats. C’est certainement sans compter sur un maquignonnage de dernière minute qui verrait l’alliance bancale renaître de ses cendres. Il faudrait pour cela que chacun des acteurs accepte la règle du jeu qui préconisait, en décembre 2015, que la coalition de centre-droit ignore totalement le parti xénophobe, raciste et anti-immigration de Jimmie Åkesson.

Est-ce vraiment ce que le parti des Modérés veut ? Pas sûr. Le rapprochement entre la droite et l’extrême-droite viendrait de la cheffe Anna Kinberg Batra qui aurait du mal à convaincre ses affidés et a donc décidé de s’affirmer par des prises de position clivantes. Du haut de son mètre quatre-vingt-deux, cette grande femme longiligne de 46 ans à l’allure mécanique pose un regard inquisiteur, glacial, hautain et un tantinet condescendant sur tout ce qui l’entoure… Et si son manque évident de charisme était finalement un atout ? Que se cache-t-il derrière ce visage inaccessible en croissant de lune au menton en galoche ? Pourquoi cet air austère quasi revêche ? Pour le sérieux du poste qu’elle occupe ? Sur ce point, force est de constater qu’elle a réussi à l’incarner ! Le précédent patron des Modérés, Fredrik Reinfeldt, avait fait l’unanimité sur sa personne dès le début de son mandat. Il avait fondé les « nouveaux conservateurs ». Un cocktail de libéralisme sur fond de protection sociale héritée de la social-démocratie. Anna Kinberg Batra n’est pas dans ce courant de pensée. Pour elle, un retour aux fondamentaux du conservatisme capitalistique est nécessaire. Ce que n’apprécient pas particulièrement les autres composantes de la coalition de centre-droit, qui pourrait imploser en vol.

AKB, comme l’appellent ses partisans, va s’en voir dans les mois à venir. Ses partenaires de l’Alliance s’étaient habitués à un autre ton de gouvernance. Serait-ce l’effet Trump ? À droite toute !